Il  faut d’abord souligner que l’introduction du barrage et du plan d’eau dans le paysage initial est toujours de nature à provoquer des modifications considérables dans la structure visuelle présente.
Avec la mise en eau ces barrages dans le bassin versant de la Medjerda, le régime hydrologique du fleuve Medjerda s’est vu modifier.
Cependant, La construction du barrage en 1982 a fini par créer une étendue humide, laissant apparaître, au fil des années, une zone humide stable qui s’étend sur plus de 400 hectares. Cette zone en relation étroite avec la dynamique écologique du fleuve Medjerda et constitue un riche réservoir de la biodiversité.

Impact sur le régime hydraulique des cours d’eau : Oued Medjerda

Depuis l'ouverture du barrage Sidi Salem sur le cours d'eau de la Medjerda, en 1982, une réduction importante du débit écoulé dans la basse vallée a été observée.
Le régime hydraulique des cours d’eau subit des variabilités témoignant dans ce cas l'impact des aménagements hydrauliques sur ces cours ; Ce qui explique la diminution du débit à Slouguia suite à la construction principalement les barrages : Lakhemes (1966),  Kassab (1968), Sidi Salem (1982) et Siliana (1987).
Des études montrent qu’avec la mise en eau ces barrages dans le bassin versant de la Medjerda, le régime hydrologique du fleuve Medjerda a été modifié.

L’évolution morphologique dans les rivières est le résultat d’une interaction permanente de plusieurs processus, dont les mécanismes d’érosion hydrique et de déposition des particules. Ces facteurs peuvent aussi expliquer l’évolution morphologique des rivières.
On note que plusieurs facteurs accélèrent le phénomène de l'érosion hydrique. En effet, parmi ces facteurs déterminants, on peut citer l’irrégularité climatique, la torrentialité des écoulements, la faible densité du couvert végétal aux abords des cours d’eau et la sur exploitation des terres, comme par exemple l’exploitation intensive des oliviers sur les rives du fleuve de Medjerda. 
Des études d’impact des aménagements hydrauliques sur la morphologie des cours d’eau appuient ce point de vue.
 
La première étude sous l’intitulé de « Impact des aménagements anthropiques sur le régime hydrologique dans le bassin de la Medjerda, Tunisie F. Kotti , G. Mahé, H. Habaieb ,C. Dieulin2, R. Calvez3 1 : Institut National Agronomique de Tunis », a eu recours à l’interprétation des images satellitaires Landsat pour les années 2003, 2009, 2011 et 2013. Par l’interprétation des images, l’étude a permis de cartographier les évolutions de la morphologie du bassin versant de la moyenne vallée de la Medjerda. Elle montre que les méandres du tronçon Sidi Salem- Laâroussia ont été affectés de façon progressive et croissante par le dépôt sédimentaire de part et d’autre des rives du lit mineur à cause des lâchers du Barrage Sidi Salem. Quant à la profondeur du lit, le creusement subit par le courant d’eau est remarquable au niveau de l’amont de barrage Laâroussia.

La deuxième Etude s’intitule « Etude des crues et du transport sédimentaire associé : application au bassin versant de la MEDJERDA M. MOHAMED GHARB, elle montre qu’En Tunisie, les problèmes d’inondation et de transport sédimentaire se posent de façon critique, en particulier au niveau du bassin versant de la Medjerda. Elle confirme que depuis la mise en service du barrage Sidi Salem (1981) sur le bassin de la Medjerda, des modifications du régime d’écoulement en aval sont apparues sous la forme d’une diminution de la débitance.
Cette diminution a eu pour conséquence d’abaisser la capacité de l’Oued à transporter les sédiments et de favoriser leur dépôt. Ceci a entraîné un engraissement du lit, et par conséquent, une occurrence accrue des inondations.
L’étude montre que la diminution de la débitance, résultant de ces phénomènes, n’est pas due à un apport solide supplémentaire, mais aux quantités de sédiments piégés par le barrage. Une conséquence directe est l’augmentation du risque d’inondation. Depuis la construction du barrage, le débit de débordement a globalement diminué, mais la modification du lit de l’Oued Medjerda laisse craindre un risque d’inondation majeur.

La troisième étude concerne la thèse de Mohamed Gharbi intitulée « Etude des crues eu transport sédimentaire associé –application au bassin versant de la Medjerda », selon laquelle, l’évolution morphologique de la Medjerda lors des crues est due essentiellement au phénomène du transport solide qui influence en grande partie son équilibre hydrodynamique. Ces changements dans la morphologie de l’Oued peuvent favoriser les inondations, menacer, déstabiliser les ouvrages hydrauliques, et de manière plus large perturber leur exploitation. Il démontre que , Sur le bassin versant de la Medjerda, une diminution sensible du débit caractéristique de crue, surtout après la mise en service du barrage Sidi Salem, a provoqué des modifications au niveau des caractéristiques morphologiques de la Medjerda se traduisant par une diminution très nette des sections de passage de l’écoulement. Le positionnement du barrage au niveau du cours d’eau principal provoque le blocage de transit sédimentaire de l’Oued et colmate le fond de la retenue.
Selon l’auteur, Le barrage piège une partie des sédiments (8 Millions de tonnes/an de matière en suspension mesurées à Sidi Salem avant la construction du barrage, contre 4,8 Mm3 de vase piégé annuellement par l’ouvrage).
Le colmatage des retenues entraîne une réduction de la capacité de stockage de l’eau et donc compromet son fonctionnement.



Par ailleurs, en période de crue, en cas d’ouverture des vannes du fond, des quantités de sédiments sortent du barrage et contribuent aux modifications de la géomorphologie de la Medjerda.



Impact sur la dynamique écologique du site

La construction du barrage en 1982 a créé une étendue humide, laissant apparaître, au fil des années, une zone humide stable qui s’étend sur plus de 400 hectares. C’est une zone caractérisée par la diversité des habitats dans un espace relativement petit. Cette zone est en relation étroite avec la dynamique écologique du fleuve Medjerda et constitue un riche réservoir de la biodiversité.

Les Caractéristiques naturelles du site

Le barrage de Sidi Salem est alimenté par plusieurs oueds: El Kassab, El Maleh, Raghay, Mliz, Mellegue, Tassa, El Hammam, Bou Hertma, Tibar…
La zone fait partie de l’étage bioclimatique semi-aride supérieur marqué par un été chaud et un hiver doux.
La pluviométrie moyenne annuelle oscille entre 400 et 450 mm avec une répartition saisonnière irrégulière. Des précipitations moyennes de 5,9 mm font du mois de juin le mois le plus sec. En janvier, les précipitations sont les plus importantes de l’année avec une moyenne de 84,7 mm. La région se caractérise par un hiver froid où la température moyenne est de 10,3°C et un été chaud où la température moyenne est de 30°C et peut atteindre 47°C aux mois de juillet et août. (Source Exploralis)
Grâce à un climat favorable et un substrat géologique plus ou moins riche, notamment sur les rives, la région présente une couverture végétale très diversifiée : on retrouve sur la rive Ouest du romarin, du thym, du calycotome et du ciste de Montpellier ainsi que des champs de céréales. La rive Est comporte cette même flore avec de l'acacia et une forêt de pinèdes très dense.
Deux types de falaises s’observent dans la zone :
- Les falaises rocheuses qui se situent tout au long des vallées principales qui découpent les plateaux et les massifs montagneux, constituant de véritables canyons, parfois très étroits
- Les falaises argileuses et sableuses
Les falaises sont des sites accueillants différentes espèces de grands rapaces et même d’autres petites espèces comme les martinets, les merles bleu, les moineaux , les guêpiers…

La couverture végétale



-Les forêts et les maquis : Les forêts constituées essentiellement d’Acacias située sur les rives, la forêt de pins enfin la forêt de cyprès. Quant aux maquis, il s’agit d’une formation végétale plus basse qu’une forêt, elle est cependant très dense ou clairsemée, et constituée principalement d’arbrisseaux résistants à la sécheresse et formant des fourrés épineux et inextricables. On y trouve deux principaux, un maquis bas clairsemé formé par un groupement de thym, de romarin, de ciste et de calicotome, couvrant les collines de la rive ouest du site, et un maquis dense arbustif, représenté par un groupement d’oléastres, de thuyas de Berbérie, de lentisques, de calicotomes et de bruyères arborescentes couvrant l’est du site.




Les forêts et les maquis jouent un rôle très important, d’abord ils contribuent à la protection des rives contre l’érosion en jouant le rôle d’un fixateur du sol et en amortissant les forts courants de ruissellement, d’ailleurs la foret d’acacia a été introduite suite à la construction de barrage. Ensuite, Au piégeage des sédiments et des feuilles mortes par la fixation de ces matières organiques.




-Les roselières sont des formations végétales caractéristiques des milieux humides ayant des niveaux d’eau et de salinité́ variables. Les plus communes les phragmitaies, les typhaies, les scirpaies littorales, et Les joncs. Les roselières jouent un rôle primordial dans l’équilibre naturel de cette zone humide, et notamment dans un écosystème biodiversifié qui compte parmi les principaux réservoirs d’eau potable dans le nord-ouest tunisien.



Source : Exploralis
Les roselières contribuent, d’abord à la protection des rives contre l’érosion, comme un brise-lame naturel, elles amortissent les forts courants de marée et de crue. Ensuite, le piégeage des sédiments, en effet, les rhizomes et les feuilles retiennent les matières en suspension. Et enfin, l’épuration du milieu en absorbant  les nutriments (azote, phosphore…), en participant  à l’oxygénation du fleuve (“poumons de la zone humide”).

La Biodiversité

En l’absence d’études comparatives se rapportant à la biodiversité avant et après la construction du barrage, nous nous sommes référer à des études d’inventaires de la biodiversité au sein du site.

D’ailleurs, selon une étude scientifique élaborée par l’association Exploralis, l’inventaire de la biodiversité effectué entre Novembre 2015 et Avril 2017, prouve que le site constitue un riche réservoir de la biodiversité. Le choix de rapport pour l’étude de la biodiversité se justifie par le fait qu’il soit le plus récent et le plus complet.

L’étude de cette zone montre que celle-ci comporte 13 types d’habitats différents, et accueille plus de 187 espèces d’oiseaux (,59 espèces sédentaires, 33 espèces estivantes nicheuses, 51 espèces migratrices de passage pré et postnuptial et 47 espèces hivernantes.) 28 espèces de mammifères (dont une dizaine des chauves-souris), 14 espèces de reptiles et 6 espèces d’amphibiens et plus de 400 espèces d’insectes (évalué à 16 Ordres, 53 Familles et 82 Genres).

En effet, en observant le site, pourtant pas très large, les scientifiques notent la présence importante aussi bien d’oiseux migrateurs que sédentaires, ils ont même remarqué la présence des espèces très rare comme le splendide aigle de Bonelli. Le secteur de l’Embouchure du barrage de Sidi Salem est une zone humide très favorable aux Amphibiens, Sur les 7 Amphibiens de la Tunisie, cinq espèces se rencontrent dans le secteur prospecté, ceci est un bon indicateur, surtout que les Amphibiens et les Reptiles, sont considérées comme étant de bons indicateurs des perturbations des milieux naturels et un modèle biologique utilisé pour étudier l’impact des changements climatiques et des activités trophiques sur la biodiversité. Parmi les mammifères, beaucoup de carnivores ont été repérés dont le loup doré, le renard roux, la mangouste, le chacal et les hyènes rayées.

L’ensemble des éléments cités ci-dessus traduit la richesse et l’importance de la biodiversité locale, au site du barrage de Sidi Salem.
CE SITE A ÉTÉ CONSTRUIT EN UTILISANT